Que font les scientifiques de l’expédition Canada C3?

Par : Mike Wong

Je m’appelle Mike Wong et je suis le scientifique en chef de l’Étape 3 de l’expédition Canada C3. Je travaille avec trois autres scientifiques : Paula Piilonen, Ben Sutherland et Yann Côté-Nadeau. Durant l’expédition, nous réalisons plus de 20 travaux de recherche soumis par certains des meilleurs scientifiques du Musée canadien de la nature, de Pêches et Océans Canada, du Service hydrographique du Canada, de l’Aquarium de Vancouver et de nombreuses universités canadiennes. Voici un petit aperçu de notre travail.

Une occasion unique d’étudier la biodiversité du Canada

Une grande partie du travail que nous souhaitons effectuer consiste à étudier la biodiversité du Canada. Nous voulons en savoir davantage sur les formes de vie végétale et animale qui proviennent de notre pays, qu’elles soient sur terre ou dans l’océan. Bien que nous possédions déjà beaucoup de connaissances au sujet de grandes espèces comme l’ours ou le cerf, il existe plusieurs autres espèces que nous connaissons très peu : des espèces d’algues ou de plancton, par exemple.

L’avantage de mener des recherches pendant l’expédition, c’est que le navire se rend dans de nombreux endroits où des échantillons environnementaux n’ont jamais été prélevés. Le Canada est très vaste et se compose de nombreux écosystèmes différents. Par exemple, durant l’Étape 3, nous visitons l’île d’Anticosti et l’archipel de Mingan, des endroits qui présentent des écosystèmes très différents de ceux d’autres régions du Québec.

Examiner la distribution des microplastiques

Un autre travail qui sera conduit partout au Canada consistera à examiner les microplastiques dans le sable et les sédiments des zones côtières.

Les microplastiques sont des particules de matière plastique de moins de 5 mm. La plupart proviennent de produits de consommation comme le dentifrice, les exfoliants pour le visage et les détergents. Ils se sont récemment ajoutés à notre usage massif du plastique. Après leur utilisation, ils finissent dans nos rivières, nos lacs et nos océans.

Évaluer la présence des microplastiques est devenue une priorité scientifique majeure, car certaines études ont démontré qu’ils pouvaient se retrouver dans les poissons et les crustacés. Si cela se produit de façon régulière, quel est l’impact potentiel sur ces organismes? Quel est l’impact potentiel sur nous, qui consommons ces poissons et ces crustacés?

Chaque fois que l’expédition fera halte, nous collecterons des échantillons qui seront envoyés à Peter Ross, à l’Aquarium de Vancouver, pour être analysés. Nous ne savons pas encore si nous trouverons des microplastiques dans certains endroits éloignés. Bientôt, grâce à ces échantillons, nous pourrons vérifier la présence de ces nouvelles matières polluantes dans les écosystèmes du Canada.

Qu’est-ce que l’ADN environnemental?

L’analyse de l’ADN environnemental est une technologie relativement récente qui a été développée au cours de la dernière décennie. En utilisant des méthodes d’analyse extrêmement sensibles, des scientifiques comme Kristi Miller-Saunders et Kim Howland sont maintenant capables de détecter l’ADN de différentes espèces dans l’eau. Au lieu d’avoir à capturer des spécimens, nous pouvons déceler leur présence en analysant les traces qu’ils laissent derrière eux! Au cours de l’expédition, nous recueillerons des échantillons d’eau et les préparerons avant qu’ils ne soient envoyés aux laboratoires de Pêches et Océans Canada et de l’Université de la Colombie-Britannique. À l’Étape 15, les scientifiques détiendront une bonne collection d’échantillons et pourront identifier quelles espèces se trouvent dans certains écosystèmes. Encore plus intéressant peut-être sera le fait de localiser l’ADN d’espèces que nous ne nous attendons pas à rencontrer; l’ADN d’espèces envahissantes provenant d’autres continents, par exemple.

Des échantillons pour l’Herbier national du Canada

Les scientifiques du Musée canadien de la nature ont proposé un très grand projet à Canada C3. Dans chaque endroit où nous nous arrêtons, nous installons un quadrat de 10 par 30 mètres et nous récoltons des spécimens végétaux allant des graminées et des fougères aux arbustes, aux mousses et aux lichens. Ces spécimens sont ensuite étiquetés, échantillonnés pour une analyse d’ADN et préparés pour l’Herbier national du Musée canadien de la nature. Nous essayons de récolter plusieurs échantillons de chaque espèce afin de pouvoir les partager avec des experts du monde entier. Si vous étudiez des espèces de plantes spécifiques, vous pouvez contacter le Musée pour voir ce qui fait déjà partie de leur collection.

Les diatomées : de petites algues formidables

Les diatomées sont des microalgues : de minuscules créatures faites de silicium, qu’on trouve dans tous les types d’eau. Elles sont extrêmement sensibles aux changements qui surviennent dans l’eau; aux modifications de sa température ou de sa composition chimique, par exemple. Nous pouvons, en quelque sorte, évaluer les changements environnementaux qui se produisent dans l’eau en analysant les diatomées.

Les diatomées sont incroyablement importantes parce qu’elles sont les principales productrices de nourriture pour les organismes supérieurs. Elles fabriquent aussi de l’oxygène et absorbent le dioxyde de carbone dans leur environnement. Ce sont des organismes très importants au Canada, mais nous en savons très peu à leur sujet.

Au Musée canadien de la nature, les travaux de Paul Hamilton sont axés sur les diatomées. Nous collectons des échantillons d’eau qui contiennent des diatomées d’eau douce et d’eau de mer. Chaque fois que des scientifiques du Musée vont sur le terrain, Paul leur fournit un outil d’échantillonnage sophistiqué : une poire à jus accompagnée de bouteilles de prélèvement pour recueillir des diatomées partout au Canada. Il est amusant de rentrer à la maison ensuite, et de lui remettre ces échantillons en sachant que personne avant nous n’en a récolté dans cette partie du pays!

Parce que l’expédition Canada C3 voyagera dans des endroits uniques, nous serons en mesure de déterminer où apparaissent ces microalgues et comment elles se distribuent dans les trois océans du Canada.

Mike Wong est un scientifique et un gestionnaire qui cumule plus de 15 ans d’expérience auprès d’Environnement Canada et 15 ans auprès de Parcs Canada. Il participe maintenant au travail de la Commission mondiale des aires protégées de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), la plus ancienne et la plus vaste organisation de conservation au monde.

Paula Piilonen est chercheuse au Musée canadien de la nature et chef de la section de minéralogie. Elle travaille pour le Musée depuis plus de 15 ans.

Ben Sutherland est boursier postdoctoral à l’Université de la Colombie-Britannique et à Pêches et Océans Canada. Ses travaux se concentrent sur l’écologie moléculaire.